Hello 👋
Cette semaine, je vous parle d’une phrase qui m’a traumatisée.
Une phrase qu’un maître de stage, particulièrement à cheval (et un peu psychorigide ?) sur ce qui s’écrit (ou pas) dans le monde professionnel, m’a mis dans la tête à coup de burin.
Pendant 15 ans, j’ai suivi cette règle d’or sans jamais la questionner.
Je vous le dis solennellement : je m’en suis sorti et je suis prêt, aujourd’hui, à répondre à cette question fondamentale : on est-il vraiment un con ?
Bonne lecture !
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La phrase du jour
L’histoire d’un traumatisme
En 2004, je démarre une année de césure dans la direction d’ingénierie d’une très grande entreprise dans le secteur de l’aéronautique et la défense. Ma première vraie expérience pro.
J’ai un maître de stage, appelons-le Christophe, l’archétype d’un ingénieur. Il est passionné de technique. Il lit toutes les publications scientifiques de son domaine. Il a mille idées de choses à expérimenter (ce qui occupe beaucoup ses stagiaires).
Christophe est exigeant et déteste deux types de personnes :
Celles qui ne sont pas assez intelligentes pour comprendre et mettre en application ses idées (Christophe n’aime donc pas grand monde…) ;
Celles qui utilisent le pronom “on” dans leurs écrits professionnels.
J’en ai fait les frais au début de mon stage. J’ai laissé trainer des “on” dans un rapport. Une grave erreur qui n’allait pas se reproduire…
Pour m’aider à me souvenir de la règle, Christophe m’a dit cette phrase : “c’est simple, on est un con !”. Suite à cet épisode fâcheux, j’ai banni le mot “on” dans mes écrits pendant plus de 15 ans.
Il ne faut pas sous-estimer l’influence considérable de ses premiers chefs sur ses façons de travailler…
On a bien des défauts
Christophe n’avait pas inventé l’expression “On est un con”. Elle a même sa définition sur wikitionnaire :
Réplique utilisée pour rejeter une affirmation dont le sujet est on, dénuant cette information d’intérêt, de valeur car provenant d’une personne non identifiée, voire stupide ou malintentionnée
On est indéfini et c’est son plus grand défaut.
Mon maître de stage détestait les choses imprécises. Quand il s’agit de décrire le fonctionnement d’un process ou faire le compte rendu d’une réunion, préciser qui fait quoi évite bien des malentendus.
On permet de généraliser, pour le meilleur, mais souvent pour le pire :
Colporter des rumeurs : On m’a dit que…
Rejeter des changements : On a toujours fait comme ça
Faire peur : On n’est pas en sécurité dans ce pays
Se faire peur : Que va-t-on penser de moi ?
Faire des reproches : On ne comprend rien à ce que tu racontes
…
Alors, comment éviter d’écrire “on” ?
“Nous” est relou
Il est assez simple de supprimer le pronom on à l’écrit : remplacez-le par “nous” et le tour est joué ! Cela marche presque à tous les coups pour peu qu’on définisse qui se cache derrière “nous”.
Dans ma carrière professionnelle, j’ai écrit des centaines de réponses à appel d’offres (des propales dans le jargon), toujours truffées de “nous” : Nous allons faire…, Nous sommes convaincus que…, Nous vous proposons…
Il n’y a jamais de on : ça ne serait pas sérieux. Pourtant, le pronom “nous” est rarement défini explicitement. Dans l’exemple, il peut représenter l’entreprise qui répond à l’appel d’offre, l’équipe qui interviendrait…
Au final, une propale est le plus souvent un document indigeste, auto-centré, pompeux.
On est peut-être un con.
Mais Nous est particulièrement relou.
La beauté du pronom On
Il m’a fallu beaucoup de temps pour utiliser On dans un contexte pro.
Le pronom On donne plus d’oralité aux textes. Et ça, c’est cool !
On est également un véritable couteau-suisse qui peut prendre la place de tous les autres pronoms. Un véritable artiste qui n’a pas le succès qu’il mérite.
Pour vous en convaincre, je vous conseille l’article Pauvre On sur le site de l’académie française.
À ce pauvre pronom on fait aussi souvent reproche de son étonnante plasticité, alors qu’il est comme ces grands acteurs dont on dit qu’ils peuvent tout jouer. Lui présente-t-on quelque autre pronom, quelle que soit sa personne, il se coule dans sa peau avec une facilité qui tient du génie
En bourrant le crâne de tous les écoliers (et les stagiaires) avec la phrase “On est un con”, on les prive d’une des plus grandes richesses de la langue française.
Dommage 🙁
Alors, on ose casser les codes ?
Ce n’est pas parce qu’on évolue dans le monde corporate qu’il faut systématiquement utiliser un vocabulaire de juristes (pardon pour eux !).
Au diable les règles simplistes qui appauvrissent notre communication !
Être capable d’adapter sa communication aux situations que nous rencontrons au travail est une qualité inestimable.
L’usage du pronom On, à bon escient et avec modération, je dis mille fois oui !
Faut-il s’abstenir définitivement d’utiliser la réplique “On est un con” ?
Selon moi, il n’y a qu’un seul cas d’usage autorisé : quand quelqu’un dit une grosse connerie.
Alors, la prochaine fois que votre oncle Jean-Paul sortira, au milieu du repas de famille, une phrase comme “Le changement climatique, on est pas sûr que ça existe”, vous pourrez lui rétorquer : “On est un con tonton, on est un con”.
Vous l’aurez compris, On doit être utilisé avec sagacité. On ne peut pas le laisser entre toutes les mains.
Malheureusement, les cons ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnait.
A bientôt pour le prochain épisode 😀
Jérôme
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Je suis Jérôme Labastie, consultant et formateur en organisation & management.
J’ai cofondé Onirio, un cabinet de conseil et formation qui aide les entreprises à changer positivement leurs façons de travailler. Pour découvrir ce que nous faisons, c’est ici : https://onirio.fr
D'ailleurs le glissement suivant c'est que "on" utilise "nous" pour dire "je" 😉